samedi 12 janvier 2013

Le vecteur (a entre 2000 et 200 ans), le spineur (exactement 100 ans) et le scalaire (... moins d'1 an?)

// travail de rédaction (encore) en cours ... presque terminé.

Et facta est lux : la lumière offre à la physique son premier (champs de) vecteur(s) ... 
Le concept de vecteur, né formellement du mariage de la géométrie et de l'algèbre opéré par les savants de la civilisation arabo-musulmane comme Omar Khayyam est déjà employé dans une certaine mesure par le physicien de la mécanique Héron d'Alexandrie il y a deux mille ans mais il est forgé explicitement par les mathématiciens il y a environ deux cent ans, conjointement avec la représentation géométrique des nombres complexes. Outre la mécanique, où la vitesse est traitée implicitement comme un vecteur par Newton, c'est peut-être la théorie des champs électriques et magnétiques développée en particulier par Faraday et Maxwell qui va donner toutes ses lettres de noblesse à la notion de vecteurs en physique (et celle de champs en mathématiques?). 
Il faut rappeler aussi que la démonstration de la nature vectorielle des ondes lumineuses se trouve déjà dans les travaux de Fresnel de 1822 inspirés par les expériences d'optique anisotrope sur la polarisation de la lumière et la biréfringence et la chiralité de la matière cf Malus, Young, Arago et Biot effectuées entre 1808 et 1812). 
\\Historique du vecteur de Fresnel ???

L'éther classique disparaît au profit d'une nouvelle symétrie 
Après l'expérience de Fizeau (1851) qui se révèle a posteriori (1907!) compatible avec certaines conséquences du modèle mécanique de propagation de la lumière dans l'éther luminifère (lettre de Fresnel à Arago 1818) :
Si la lumière n'est qu'un certain mode de vibration d'un fluide universel, comme les phénomènes de la diffraction le démontrent on ne doit plus supposé que son action chimique sur les corps consiste dans une combinaison de ses molécules avec les leurs mais dans une action mécanique que les vibrations de ce fluide exercent sur les particules pondérables ... 
Fresnel, De La Lumière (mémoire présenté à l'Académie des Sciences tiré de ce livre publié en 1819)
l'expérience de Michelson et Morley (1881-7) indique finalement que la lumière ne se propage pas dans un éther matériel contrairement à l'intuition première (par trop "naïve"?) du Physicien.

Une nouvelle transformation mathématique est proposée par Lorentz (1904) pour rendre l'interprétation de l'expérience de Michelson et Morley compatible avec les équations de Maxwell pour l'électromagnétisme.
Poincaré (1905) approfondit la question en lui donnant une formulation physico-mathématique rigoureuse en terme de groupe de symétrie spatio-temporelle. 
La théorie de la relativité restreinte d'Einstein (1905) complète (approfondit) la signification physique chronogéométrique des transformations de Lorentz et du groupe de Poincaré. 

Peu nous importe que l'éther existe réellement, c'est l'affaire des métaphysiciens ... un jour viendra sans doute où l'éther sera rejeté comme inutile ... Ces hypothèses ne jouent qu'un rôle secondaire. On pourrait les sacrifier ; on ne le fait pas d'ordinaire parce que l'exposition y perdrait en clarté, mais cette raison est la seule.
                                        Poincaré La science et l'hypothèse (1902), p 246 (d'après ce cite). 

La physique quantique n'est pas simple mais complexe (la première quantification)
Expérience du corps noir (18??) ...
Hypothèse de Planck (1900) de quantification des échanges d'énergie ...
Postulat du quantum de lumière proposé par Einstein (1905) ...
Hypothèse de de Broglie (1924) ...
Equation de Schrödinger (1925)
Diffraction des électrons (1927) ...

La physique quantique n'est pas irrationnelle mais spinorielle (la deuxième quantification)
Le mathématicien Elie Cartan découvre (1913) à l'occasion d'un travail sur la représentation des groupes une nouvelle structure mathématique : les spineurs !
L'Expérience de Stern et Gerlach (1922) met en évidence une structure fine inattendue dans le spectre Zeeman des électrons.
Pauli a l'intuition (1924) que cet effet magnétique anormal est dû à la nature intrinsèque de l'électron, Ulhenbeck et Goudsmit propose un modèle (1925) explicatif basé sur la notion de spin demi-entier, propriété quantique (encore mystérieuse ou difficilement descriptible) associée aux électrons puis à toutes les particules matérielles connues ...
La théorie quantique de l'électrodynamique naît officiellement (1927) avec le travail de Dirac sur l'émission et l'absorption du rayonnement. La lumière, à travers la notion de photon a désormais un vrai statu quantique et le quantum de quantum de lumière un spin égal à un (associé à la nature vectorielle des champs électriques et magnétiques).
L'équation de Dirac (1928) est ensuite formulée permettant de marier les formalismes de la mécanique quantique et de la relativité restreinte pour décrire non pas le rayonnement (le photon) mais la matière (l'électron).

Pendant que physique et mathématiques s'enrichissent mutuellement, de nouvelles symétries apparaissent et d'autres sont brisées 
Au fil du temps les physiciens s'aperçoivent qu'ils ont retrouvé indépendamment des mathématiciens le concept de spineur, grandeur fondamentale de l'électrodynamique quantique et de nombreuses autres théories quantique des champs comme le modèle standard.
En exploitant encore la vaste machinerie mathématique de la théorie des groupes Wigner (1939) classifie les représentations irréductibles du groupe de Poincaré et montre que les particules matérielles élémentaires peuvent être classées par deux paramètres: le spin et la masse. 
Les théorèmes spin-statistiques (Fierz 1939 et Pauli 1940) et CPT (initié par Schwinger en 1951 et démontré par Lüders, Pauli et Bell en 1954-5) approfondissent aussi les bases des théories quantiques des champs relativistes et renforcent leur statu mathématique rendu incertain par certains problèmes d'unitarité ou de renormalisation que posent ces théories. Problèmes qui sont résolus au fur et à mesure par des avancées formelles remarquables accomplies d'abord par des physiciens théoriciens puis reprises par des mathématiciens pour enrichir à leur tour leur discipline (théories de jauge renormalisables de Yang Mills, ... ).  Le meilleur exemple de l'étroitesse des liens entre physique théorique et mathématique pure est naturellement la médaille Fields, une des plus hautes distinctions mathématiques, attribuée au physicien Witten (1990) décrit en ces termes par un célèbre mathématicien :
Although he is definitely a physicist, his command of mathematics is rivaled by few mathematicians... Time and again he has surprised the mathematical community by a brilliant application of physical insight leading to new and deep mathematical theorems... he has made a profound impact on contemporary mathematics. In his hands physics is once again providing a rich source of inspiration and insight in mathematics.
  Sir Attyiah Collected Works: Volume 6. Oxford Science Publications. pp. 209, 212.
Les symétries de jauges non-abéliennes sont introduites par les physiciens et leur étude mathématique va ouvrir de nouvelles perspective pour cette discipline. 
Le spin continue à jouer un rôle central en particulier avec la mise au jour de l'importance des symétries chirales dans le modèle standard de la physique des particules.
La masse s'avère aussi jouer un rôle majeur à travers la notion de brisure de symétrie...

En cherchant des particules supersymétriques on tombe sur une première particule scalaire 
Pour aller au delà de la relativité générale et de la théorie des champs ou intégrer le champ de gravitation dans une théorie unitaire avec le modèle standard une nouvelle symétrie est postulée : la supersymétrie (pas de validation expérimentale à ce jour) qui implique un doublement du nombre de particules élémentaires ...
Parallèlement certains physiciens cherchent à établir expérimentalement que certaines des symétries d'hier sont brisées (symétrie CPT, ou invariance de Lorentz, toujours pas brisée).
D'autres physiciens tentent avec plus de succès de trouver le mécanisme de brisure de la symétrie électrofaible (mécanisme (A)BEHHGK 1964, découverte du boson de Higgs par les détecteurs ATLAS et CMS grâce à l'accélérateur LHC 2012).

Un modèle presque commutatif et une image dédoublée de l'espace-temps (?)
Un exemple remarquable de collaboration actuelle entre un mathématicien et un physicien est le modèle spectral non-commutatif (Chamseddine et Connes 2010) qui tente d'unifier dans un même formalisme la physique de l'infiniment petit et de l'infiniment grand, modèle qui a le mérite de faire des prévisions aujourd'hui testables et pour le moment en accord avec les expériences actuelles (oscillations des neutrinos, masse du boson de Higgs, stabilité du proton, absence de particules supersymétriques en deçà du Tera-électronvolt). Le modèle présente aussi des analogies troublantes avec certains développements théoriques récents (inflation cosmologique contrôlée par le champ de Higgs, sécurité asymptotique d'une théorie quantique du champ de gravitation, modèle de Randall-Sundrum en cosmologie branaire) ou plus anciens (modèles de Kaluza-Klein, de Pati-Salam).
Malheureusement ce modèle n'a pas encore convaincu la majorité des physiciens (qui le discutent négativement ou positivement ou l'ignorent poliment) : s'agit-il seulement d'une unification formelle de la relativité générale et de la théorie quantique des champs de jauge, d'une quasi-quantification de la gravité ou d'une axiomatisation géométrique complète du modèle standard (voir par exemple cet article de revue sérieux de 2002)? Où alors un pas de plus est-il franchi dans la compréhension de la structure fine de la géométrie de l'espace-temps (quelque part entre l'atto-mètre et le zeptomètre) ?
La popularisation de la thèse défendue par Connes n'est pas une tâche facile :
Quel est l'avantage obtenu en utilisant des espaces plus élaborés ?... j'ai concentré mon attention sur le secteur de Higgs, la "boîte noire" du modèle standard.Le résultat est une image qualitativement différente de l'espace-temps standard, dans laquelle l'espace-temps euclidien est dédoublé en deux feuillets M et M' extrêmement voisins, chaque point x appartenant à M étant à une distance de l'ordre de 10^-18 m d'un point x' appartenant à M' de l'autre feuillet. 
                                                                             Alain Connes Géométrie non commutative 1990

mais certains jeunes physiciens s'y attellent avec courage en soulignant les subtilités (dangers) de cette image (analogie) :

                  Pierre Martinetti Une brève introduction à la description du modèle standard des particules élémentaires par la géométrie non commutative (2003)

En attendant un nouvel Einstein c'est une intuition renouvelée de l'espace qu'il nous faut...
La théorie de Connes et ses collaborateurs offre donc un point de vue nouveau : sur le scalaire de Higgs, dans le sens où elle fait apparaître ce dernier comme une sorte de cousin non-commutatif du photon (un boson "de jauge" de spin nul et non de spin un), mais aussi sur les théories de Kaluza-Klein déjà citées plus haut (qui imaginaient des espaces-temps à cinq dimensions) et sur leur compactification (à quatre dimensions). 
La situation actuelle peut sembler un peu analogue à la période charnière entre 1904 et 1905 lorsque les transformations mathématiques de Lorentz attendaient encore d'être intégrées dans une théorie physique claire, une théorie certes en germe dans les idées de Poincaré mais véritablement mise sur pied et exploitée par Einstein.

... et un approfondissement (épaississement?) du concept de nombres réels ou complexes (ou bien des quaternions ou des quantions)
Signalons aussi que la démarche de Connes pour développer son modèle spectral a ceci de particulier qu'elle prend au sérieux (affronte vraiment) les deux grandes nouveautés théoriques de la physique du XX siècle : la quantification et la renormalisation ...
A l'inverse on peut se demander si la théorie des cordes (la supersymétrie), bien qu'elle approfondisse elle aussi la physique quantique et les théories de Kaluza-Klein, n'a pas commis une erreur épistémologique (ou heuristique) en s'étant construite essentiellement comme une tentative visant à contourner (esquiver en partie) le problème de la renormalisation ...
On peut aussi s'interroger sur la rapidité de la construction théorique de la mécanique quantique qui contraste tant avec le lent et chaotique développement des théories quantiques des champs renormalisables. La raison de cette différence de rythme ne vient-elle pas de ce que la première bénéficia de l'existence d'un formalisme mathématique déjà prêt à l'emploi à travers l'algèbre linéaire et l'analyse harmonique alors que pour la seconde son formalisme naturel se construit au fur et à mesure que l'oracle de la physique expérimentale parle et passe au crible du réel les virtuels possibles ?

L'éther ressuscite mais sous une forme quantique en se dotant d'une composante scalaire et donne sa masse à la matière : et facta est materia
Pour terminer précisons que le boson de Higgs n'est rien d'autre qu'un quantum du champ scalaire du même nom, lequel est responsable en gros de la masse de (presque) tous les fermions élémentaires (le cas des neutrinos est plus délicat) et de certains bosons de jauge élémentaires (pas le photon, ni les gluons). Or cette propriété (la brisure de la symétrie électrofaible), le champ scalaire de Higgs la doit au fait d'avoir une valeur moyenne non nulle dans son état fondamental que l'on appelle aussi "vide". D'une certaine manière l'observation du Higgs valide donc l'existence d'un éther quantique (il y a bien sûr d'autres manifestations du vide quantique, associées à d'autres champs, déjà établies expérimentalement cf émission spontanéeforces de Casimir, déplacement de Lamb par exemple).







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